Le mortier et le pilon : Des broyeurs manuels traditionnels pour la transformation de la farine

Article : Le mortier et le pilon : Des broyeurs manuels traditionnels pour la transformation de la farine
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30 juillet 2023

Le mortier et le pilon : Des broyeurs manuels traditionnels pour la transformation de la farine

Dans les villages reculés de la province du Kasaï-Central en RDC, une pratique ancestrale persiste : l’utilisation du mortier et du pilon pour moudre les maïs et les maniocs, afin d’obtenir la précieuse farine utilisée pour préparer le nshima ou le foufou l’un des plats de base en RDC. Alors que dans les villes et certains villages, l’arrivée des moulins électriques a relégué cette méthode au passé, certains villages restent profondément attachés à cette tradition comme ceux du territoire de Dibaya au Kasaï-Central.

Un mortier, un pilon et un tamis s’unissent harmonieusement pour transformer les grains en une précieuse farine. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

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L’apprentissage dès l’enfance et le processus de broyage

Dès l’âge de 5 ans, les filles apprennent à manier le pilon, et à 10 ans, elles maîtrisent l’art du broyage aussi bien que les adultes. Le processus est exigeant, mais pas insurmontable. Pour les maïs, les grains sont d’abord humidifiés, soit en ajoutant de l’eau juste avant le broyage, soit en les trempant pendant 1 à 24 heures. Cette étape permet de ramollir les grains et facilite leur broyage. Il faut alors pilonner avec force et en rythme pour obtenir une mouture fine. De temps en temps, des tamisages sont effectués pour extraire la fraction de granulométrie souhaitée. Environ 50 minutes sont nécessaires pour broyer 3 kg de grains. Le processus est similaire pour le manioc, à la différence qu’il n’est pas humidifié avant d’être broyé.

Sous l’œil bienveillant des anciens, la jeune fille de Tshiendele village manie avec grâce le pilon, symbole de transmission et de fierté. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

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Une vue rapprochée captivante des grains dans le mortier. À côté, un tamis artisanal fabriqué avec des lianes locales, témoignant de l’ingéniosité et de la créativité de la communauté. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

Le symbolisme et l’attachement à la tradition

Bien que des moulins soient disponibles dans ces villages, de nombreuses personnes, en particulier les personnes âgées, restent attachées à cette pratique. Ce n’est pas tant par manque de moyens pour payer le moulin, bien que cela soit souvent le cas, mais plutôt parce qu’ils considèrent le mortier et le pilon comme des ustensiles fabriqués à partir de matériaux naturels, sans danger pour leur santé. De plus, cela leur permet de réaliser des économies.

Ainsi, dans ces villages, le mortier et le pilon sont bien plus qu’un simple outil de transformation de la farine. Ils représentent un lien profond avec la nature et les traditions ancestrales. Les villageois voient en ces ustensiles une connexion avec leurs racines, une manière de perpétuer un savoir-faire transmis de génération en génération.

Mère et fille s’engagent dans un travail d’équipe lors de la transformation, la jeune fille maniant le pilon avec habileté tandis que sa maman tamise avec précision. Une collaboration efficace qui reflète la solidarité et l’entraide au sein de ces communautés rurales. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

Avantages économiques et préservation des ressources naturelles

Malgré les avancées technologiques et l’accessibilité des moulins électriques, ces communautés rurales choisissent de maintenir cette pratique traditionnelle. Ils estiment que le mortier et le pilon sont empreints d’une valeur culturelle inestimable, témoignant de leur identité et de leur attachement à la nature.

Mamu Mbuyamba du village Tshiendele, à Dibaya, manie avec fierté son couteau pour éplucher les tubercules de manioc, étape nécessaire avant leur transformation en farine dans le mortier. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

Au-delà de la dimension culturelle, l’utilisation du mortier et du pilon présente également des avantages économiques. En effet, en évitant de recourir aux services des moulins, les villageois économisent de l’argent, ce qui est particulièrement important dans des régions où les ressources financières sont limitées.

Après un processus de transformation minutieux, la farine blanche tant attendue repose fièrement dans la petite bassine. (Crédit : ©Ruben en Reportage)
Le mortier, le tamis et le pilon se reposent après avoir accompli leur mission de transformation. (Crédit : ©Ruben en Reportage)

Ainsi, le mortier et le pilon continuent de jouer un rôle essentiel dans la vie quotidienne de ces communautés. Ils symbolisent la résilience, la préservation des traditions et la valorisation des ressources naturelles. Alors que le monde évolue rapidement, les villages du Kasaï-Central nous rappellent l’importance de préserver nos héritages culturels et de trouver un équilibre entre modernité et tradition.

Reportage réalisé dans la localité de Tshiendele, groupement de Bakwa-Nkola, territoire de Dibaya dans province du Kasaï-Central en RDC. (Crédit @tambourdesvillages)
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